home
Aussi à la première entrée qui s'offre à moi, je m'y engage résolument. En peu de temps, j'arrive au bout de cet élément de boyau. Je tourne à droite me croyant dans le boyau des Italiens, et comptant trouver la sape du capitaine à cinquante mètres, mais je marche, sans voir personne.
Je me sens perdu, et ne voyant comme ressource que celle de faire demi-tour, je reviens sur mes pas. Quelle n'est pas ma stupeur, lorsqu'au bout d'un instant, je me retrouve devant la sape de la troisième section.
Je souffle un instant, puis j'essaye de m'orienter. Je réfléchis que je dois faire au moins cinq ou six cent mètres avant d'arriver au boyau des Italiens. Je repars et cette fois, au lieu de tourner dans le premier boyau à gauche, je continue mon chemin, dans la tranchée, sans rencontrer personne, pendant au moins cent cinquante mètres.
Je pense que les boches pourraient venir comme ils voudraient entre les sentinelles de la deuxième section, où je me trouve, et celles de la troisième que je viens de quitter.
Voulant m'en assurer, je me hausse au-dessus du parapet afin de voir en avant. Je ne distingue qu'un amas de fil de fer, et à soixante ou soixante-dix mètres, une ligne grise : la tranchée allemande... Je file, car il est temps que je rentre au P.C. En passant devant la sape de l'adjudant Bénard, le chef de la deuxième section, un poilu en sort, un papier à la main. Je m'arrête pour le laisser passer : "Qui est là ? demande-t-il. - Cambounet. C'est toi, Rosat ? - Oui, tu vas au P.C. ? - Oui, j'y retourne. Et toi ? - Moi aussi. Tu viens ?"
Rosat est l'agent de liaison de la deuxième section. Nous rentrons donc au P.C., remettons nos bouts de papiers au fourrier, et allons à notre place, place bien minime, car il faut que je m'asseois sur une marche de l'escalier, accoté au mur et j'essaie de roupiller... C'est inutile... Il n'y a pas cinq minutes que je suis ainsi, que la voix du fourrier se fait entendre : "Agent de liaison, troisième section ! - Voilà, présent, fis-je à moitié somnolent. - Vous allez aller à votre section, dire à l'aspirant Bardot qu'il vous communique ce qui lui manque en fusées, grenades et cartouches."
|